El Watan| September 21, 2011
Ryad Al Maliki appelle Washington à revoir sa position
Le ministre palestinien des Affaires étrangères, Ryad Al Maliki, a demandé hier aux Etats-Unis de réviser leur position pour se ranger du côté de «la majorité» des pays favorables à la demande d’adhésion d’un Etat palestinien à l’ONU.
«Nous ne savons pas pour l’instant comment vont réagir les Etats-Unis. (…) Nous espérons qu’ils vont réviser leur position et se placer aux côtés de la majorité des pays», a déclaré Al Maliki, rapporte l’AFP. «Nous devons obtenir au moins neuf votes pour que notre demande soit adoptée au Conseil de sécurité. Je pense que nous allons y arriver, car tous nos efforts accomplis dans le passé ne vont pas s’achever là, parce que neuf voix nous manquent», a déclaré Al Maliki.
Lundi, la secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, a expliqué que les Etats-Unis sont engagés dans un effort de «diplomatie extrêmement intensive» pour tenter de dissuader les Palestiniens de leur projet. «Je sais que les Etats-Unis voudraient faire adopter une résolution qui serve les intérêts israéliens plus que ceux des Palestiniens. Mais j’ai confiance dans le fait qu’elle ne sera pas approuvée. Vendredi, nous remettrons (notre) lettre de demande d’adhésion au secrétaire général des Nations unies», a poursuivi le ministre palestinien, soulignant leur volonté de devenir membre «à part entière». «J’espère que les représentants du Quartette comprendront cela et nous aideront à instaurer une paix durable dans la région pour que le peuple palestinien puisse s’autodéterminer et disposer de son indépendance», a-t-il ajouté.
Les membres du Quartette pour le Proche-Orient, à savoir les Etats-Unis, la Russie, l’ONU et l’Union européenne (UE), tentent depuis des semaines de réconcilier Israéliens et Palestiniens autour d’une déclaration porteuse de garanties susceptibles de servir de base à une reprise des négociations arrêtées depuis la fin septembre 2010. Hillary Clinton et son homologue russe Sergueï Lavrov ont travaillé lundi sur une possible déclaration du Quartette visant à dénouer la crise diplomatique à l’ONU. Dire, comme le fait Israël, que la démarche des Palestiniens à l’ONU est un acte unilatéral est «absurde», a poursuivi Ryad Al Maliki. «Je n’ai jamais compris comment on peut dire que l’arrivée dans une institution multilatérale comme les Nations unies est un acte unilatéral. C’est une interprétation absurde», a dit le ministre palestinien.
Les mises en garde de Tel-Aviv
De leur côté, des ministres israéliens ont fait état de mesures économiques et politiques pour sanctionner la demande d’adhésion d’un Etat palestinien à l’ONU que le président palestinien, Mahmoud Abbas, est déterminé à présenter vendredi à New York, a indiqué hier l’AFP. Le chef de la diplomatie israélienne, Avigdor Lieberman, a mis en garde contre les «conséquences dures et graves» de l’initiative palestinienne. Il a aussi menacé d’annuler tous les accords «conclus» avec les Palestiniens. A. Lieberman faisait allusion notamment aux accords de Paris (1994) entre Israël et l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) qui prévoient le remboursement par Israël des taxes douanières et de la TVA prélevées sur les biens importés par les Palestiniens transitant par les ports et aéroports israéliens. Ces fonds, d’un montant mensuel de 60 millions d’euros, représentent les deux tiers des recettes budgétaires palestiniennes.
Sans cette somme, l’Autorité palestinienne serait dans l’incapacité d’assurer la paie de plus de 150 000 fonctionnaires. A plusieurs reprises déjà, Israël a gelé ces fonds comme moyen de pression. Le vice-ministre des Affaires étrangères, Danny Ayalon, a évoqué cette sanction dimanche lors de la réunion des bailleurs de fonds de l’Autorité palestinienne à New York. «L’assistance future et la coopération pourraient être sévèrement et irrémédiablement compromises si la direction palestinienne continue sur sa voie en agissant en violation des accords signés qui réglementent les relations économiques entre Israël et l’Autorité palestinienne», a prévenu Danny Ayalon. Selon lui, «Israël n’aura absolument aucune obligation envers un soi-disant Etat palestinien (…) créé artificiellement en violation de tous les accords».
Le ministre des Finances, Youval Steinitz, a lui aussi émis l’hypothèse d’une coupure des vivres à l’Autorité palestinienne. «Ils (les Palestiniens) veulent établir un Etat sans la paix, sans la sécurité, sans mettre fin au conflit, sans reconnaître l’Etat d’Israël, sans prendre le moindre engagement. Tout cela représente notre pire cauchemar, et cela aura un prix», a averti Y. Steinitz. Ministre chargé des Affaires stratégiques, Moshé Yalon préconise la construction de milliers de logements dans les colonies de Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Selon les médias, plusieurs dirigeants israéliens ainsi que le puissant lobby des colons sont favorables à l’annexion immédiate des blocs de colonies, où vivent la majorité des 300 000 Israéliens installés en Cisjordanie.
Le Premier ministre de droite, Benjamin Netanyahu, a affirmé qu’il souhaitait l’annexion de ces blocs dans le cadre de tout accord avec les Palestiniens. Un responsable gouvernemental israélien a toutefois précisé que Benjamin Netanyahu n’a pas encore décidé des éventuelles mesures de rétorsion si les Palestiniens vont au bout de leur démarche au Conseil de sécurité de l’ONU. «Pour le moment, Benjamin Netanyahu laisse parler Avidgor Lieberman et les autres ministres, mais il n’a pas encore tranché», a déclaré à l’AFP ce responsable en soulignant que les Etats-Unis et les Européens ont «clairement fait savoir qu’ils étaient contre toute sanction économique».
Selon le quotidien Haaretz, le ministre de la Défense, Ehud Barak, ainsi que le ministre chargé du renseignement, Dan Meridor, des modérés, sont hostiles par pragmatisme à des représailles. Selon eux, provoquer l’effondrement économique de l’Autorité palestinienne risquerait de plonger la Cisjordanie dans un chaos dont Israël devrait payer les conséquences en termes de violences et de condamnations internationales. Le président Abbas a informé le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, de son intention de lui remettre vendredi la demande d’adhésion d’un Etat de Palestine pour qu’elle soit soumise au Conseil de sécurité.